La prison n’est plus forcément l’école du crime. Des détenus aux Etats-Unis ont battu des étudiants de Harvard lors d’un débat universitaire.
Depuis 2001, Bard College, avec la Bard Prison Initiative (BPI), a créé des possibilités pédagogiques novatrices au sein des systèmes pénitentiaires américains. Les programmes transforment les effets négatifs des sanctions pénales et créent des innovations radicales en matière d’accès et de possibilité d’enseignement supérieur de niveau licence.
Les places sont chères pour les quelques 300 étudiants aujourd’hui détenus dans six prisons de l’Etat de New York et inscrits dans ce programme qui débouche sur les diplômes du Bard College.
Cette initiative offre un soutien important à ses anciens élèves à New York et dans les environs. Par ailleurs, il a développé un réseau national de 15 universités pour transformer la relation entre l’éducation et l’administration pénitentiaire américaine.
Au-delà de l’offre de formation pour les détenus, la BPI a créé en 2018 le Bard Microcollege, avec un enseignement de grande qualité proposé aux communautés isolées situées en dehors de la prison grâce à des partenariats avec des institutions communautaires.
La majorité des détenus ont été arrêtés pour la première fois alors qu’ils étaient mineurs et 97,5% des diplômés de la BPI ne retournent plus en prison. Pourtant, ce programme n’a pas que des partisans. Certains sont critiques, estimant que nombre de citoyens honnêtes doivent financer difficilement leurs propres études universitaires, d’autant qu’aux USA, celles-ci sont très onéreuses….
Des résultats stimulants
En 2015, trois détenus d’une prison de haute sécurité de l’Etat de New York avaient créé la surprise en battant lors d’un débat des étudiants de Harvard. Quatre ans après, le « Wall Street Journal », qui avait assisté alors à ce tournoi universitaire, les a retrouvés : deux sont sortis de prison et ont des emplois, et le troisième, encore incarcéré, a réussi sa maîtrise.
Les trois, souligne le journal, ont bénéficié d’un programme de l’université Bard d’Annandale-on-Hudson pour les prisons qui, gratuitement, permet à des prisonniers de faire des études.
Pourtant, les résultats sont intéressants pour la société. « Nous voulons raconter notre histoire pour changer le regard sur les gens derrière les barreaux », a dit ainsi au « Wall Street Journal » Dyjuan Tatro, qui fut l’un des vainqueurs du concours face à l’élite universitaire. « C’est une histoire de travail ardu, de rédemption et d’espoir », dit l’ancien prisonnier.
Dyjuan Tatro, qui a passé 12 ans derrière les barreaux pour une agression, est aujourd’hui responsable de la « Bard Prison Initiative » pour expliquer son fonctionnement aux députés et lever des fonds.
Après des débuts difficiles, Carlos Polanco, qui a passé 14 ans en prison pour homicide involontaire, travaille, lui, dans une firme d’investissement.
Le troisième, Carl Snyders, incarcéré il y a plus de 20 ans pour meurtre et qui sortira en 2024 de prison, a décroché une licence en études sociales et une maîtrise en études professionnelles du Séminaire théologique de New York.