On n’est rien
Seigneur, quand on est en prison, on n’est rien.
Quand on n’est rien, on a envie de te parler.
Mais quand on n’est rien, on ne pense à rien.
Alors on ne dit rien.
Pardonne-moi Seigneur,
Si je n’ai rien, si c’est le vide,
Le désert tout au fond de moi.
Mais ce rien, Seigneur,
Je te l’offre tout de même,
Parce que c’est le mien.
Et puis, il pèse si lourd, mon rien ;
C’est si dur à porter seul, un rien.
Un rien qui me fait mal au cœur,
Un rien que me brûle les yeux,
Un rien qui me donne des sueurs froides,
Un rien qui me donne mal au vente,
Un rien que me scie les jambes,
Un rien qui ne me rend pas du tout courageux,
Un rien qui me rend bizarre,
Un rien qui me rend la bouche pâteuse.
Ce rien, Seigneur, qui m’assomme, prends-le,
Pour me décharger : il est si lourd ce rien !