Pour les prisonniers, le 1er-Mai 2022 marque en France une avancée dans leur droit du travail avec l’entrée en vigueur du « contrat d’emploi pénitentiaire ». Celui-ci encadre les procédures de recrutement, de suspension et de rupture de la relation de travail, ainsi que les durées minimale et maximale de travail, le temps de repos…

La réforme du statut des travailleurs détenus est une des applications de la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire promulguée le 22 décembre 2021. Des changements essentiels pour rapprocher les droits des détenus qui travaillent du droit commun.

De nouveaux droits associés au contrat d’emploi pénitentiaire

Jusque-là, il n’y avait pas du tout de droit de travail en prison, c’est-à-dire qu’il n’y avait pas d’encadrement de la relation de travail entre les personnes détenues et le donneur d’ordre. Il n’y avait pas de rémunération équivalente au Smic, pas de flexibilité.

Ce 1er mai marque donc un changement majeur pour les détenus des établissements pénitentiaires.

Tout d’abord, le contrat de travail s’appelle dorénavant un contrat d’emploi pénitentiaire, à durée déterminée ou indéterminée. Mais ce sont surtout les droits associés à ce contrat qui changent. Il encadre les procédures de recrutement, de suspension et de rupture de la relation de travail, ou encore les durées minimale et maximale de travail, le temps de repos. Maintenant, tout détenu travailleur cotise à l’assurance chômage. Il pourra donc bénéficier de ses droits à sa sortie de prison – ce qui n’était pas le cas jusqu’ici. Même chose pour les indemnités journalières en cas d’accident professionnel ou de congé maternité.

La personne détenue aura maintenant droit au compte personnel de formation (CPF).

Un détenu volontaire pourra aussi passer des entretiens d’embauche avec les employeurs et pourra postuler. À noter que seul un motif de sécurité peut être opposé à un prisonnier qui voudrait travailler. En revanche, toujours pas de congés payés ni de compensation en cas d’arrêt maladie.
Les personnes détenues qui demandent à avoir un emploi peuvent faire un recours.

Le travail dans les prisons contre les risques de récidive

Stand « Restauration » au Forum des métiers 2018. Prison de Nantes

Le but est de se rapprocher le plus possible de ce qui existe à l’extérieur du milieu carcéral pour favoriser la réinsertion et préparer la sortie.

Cette réforme est importante car, selon le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, le travail en détention diminue de 50% le risque de récidive.

Des soucis perdurent
Cécile Marcel, directrice de la section française de l’Observatoire International des Prisons (OIP) rappelle qu’il n’y a que 28% des personnes détenues qui travaillent, essentiellement au service général de la prison, c’est-à-dire à la cantine, à la distribution des repas, au ménage. Elles travaillent aussi en concession privée, c’est-à-dire pour des prestataires extérieurs.
Par ailleurs, le salaire oscille entre 20% et 45% du Smic.

Pour Prune Missoffe de l’observatoire international des prisons, cette réforme ne va pas encore assez loin. « On regrette fortement que certains des droits de la protection sociale soient encore exclus, sans qu’on puisse le justifier par des contraintes qui seraient inhérentes à la prison, comme le cas de maladies non professionnelles ou des congés payés, et on a une réforme complètement muette sur la rémunération… Les personnes détenues restent une main-d’œuvre flexible, entièrement dépendante de l’activité des donneurs d’ordre. On a quelques avancées, mais on a toujours fait entrer le droit du travail en prison ».

L’administration pénitentiaire estime que si on oblige les concessionnaires à payer au Smic il n’y en aura plus.
Pour l’OIP, cela pose la question du contenu du travail en prison. Le problème c’est que le travail qu’on donne aux détenus est très peu qualifiant, c’est souvent de la manutention. Il faudrait complètement repenser l’organisation du travail en prison, favoriser l’insertion par l’activité économique. Il faudrait que l’économie du travail soit davantage subventionnée.

Une forte demande de la part des prisonniers

Il y a une forte demande, il y a plus de personnes qui souhaiteraient travailler que d’offres de postes. La détention coûte de l’argent. Il faut payer la télé, le frigo, le téléphone… Le fait de travailler permet d’avoir un petit pécule et de pouvoir sortir de cellule parce que, sinon, le temps en détention est extrêmement vide.

Sources : Europe1, Francetvinfo

Etudier et travailler en prison