1974 – J’EMBAUCHE

 

– Qu’est-ce que tu fais là, allongé sur ce banc du parvis de Notre Dame de Paris, crâne rasé et pieds nus ?

– Je cherche du travail !…

– Tu commence demain matin.

Le lendemain matin, il faut nettoyer les communs d’un foyer de jeunes travailleurs, aider le cuisinier du self, et, après la vaisselle, continuer le ménage des escaliers de 10 étages. Enfin, après le service du soir, au self, envisager une œuvre au profit des clochards que j’ai quitté ce matin pour une nouvelle vie.

Non! Sur ce banc, rien n’était normal; la réponse immédiate pour trouver un emploi chrétien, et la vie que je vais y mener : « Tout était sous le regard de Dieu ».

Ces deux dernières années passées dans le plus grand silence, cette vie pénitente, et ces dix à douze heures passées chaque jour dans les églises, le cœur à cœur avec la Parole de Dieu et les Sacrements ; « j’ai rendez-vous avec Dieu ».

Devenir un Homme !

Donc, après cette première journée de labeur, je me mis en quête d’une popote ambulante (chariot de supermarché) et d’une gamelle de nourriture, fruit de mon salaire; et partant pour un parcours de trois heures, j’allais de planque en planque ravitailler mes amis clochards endormis.

Le lendemain soir, nanti d’un autre caddie, je me lance pour le même périple après mon travail et, au moment où je me faisais la réflexion de me mettre à la recherche d’un véhicule moins bruyant, je vis, dans une petite rue, une caisse à trois roues (genre triporteur) à l’abandon et réquisitionnai le bolide silencieux. Le lendemain, durant ma pause de la mi-journée, « Jéricho », nettoyé et repeint, se verra rempli d’un camping-gaz deux feux, d’une glacière, d’assiettes et de couverts, ainsi que de quelques vêtements, le tout pour mes clochards.

L’éphémère « Jéricho » était né.

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